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Dans l'islam, l'enfant marié de force peut-il divorcer ?

Voici un extrait de l'article de l'Encyclopédie de l'Islam sur le mariage forcé islamique (la mise en gras est de moi) :

DJABR (A.), contrainte matrimoniale exercée sur l’un ou l’autre des futurs époux, dans des conditions variables selon les écoles juridiques. Le droit de djabr n’est prévu ni par le Ḳurʾān ni par la Sunna, et un ḥadith (al-Bukhārī, Nikāḥ, bāb 42) précise même que ni le père ni une autre personne ne peut marier sans son consentement une fille vierge ou une femme qui a déjà été en puissance de mari ; le Prophète lui-même consulta sa fille Fāṭima avant de la donner en mariage à ʿAlī, mais il semble bien que la majorité des premiers juristes musulmans aient préféré suivre une ancienne coutume arabe. Des traditions plus tardives confirment leur point de vue, de sorte que toutes les écoles ont fait du djabr un point de doctrine, sans toujours employer ce terme, qui ne figure d’ailleurs pas avec ce sens particulier dans les dictionnaires classiques.

Dans l’ensemble, ce droit appartient au maître quand il s’agit d’esclaves des deux sexes, à condition qu’ils ne subissent aucun dommage [voir ʿAbd], au père, au grand-père ou au tuteur testamentaire (waṣī) dans les autres cas ; en principe, le walī [voir Wilāya] n’en dispose que chez les Ḥanafites et, chez les Mālikites, qu’à l’égard de l’orpheline dépourvue de waṣī. A moins qu’ils ne soient frappés d’incapacité [voir Ḥadjr], les garçons acquièrent normalement le droit de consentir à leur mariage à partir de la puberté [voir Bāligh], de sorte qu’ils échappent rapidement au djabr, au moins légalement. C’est donc sur les filles que les dispositions relatives à la contrainte matrimoniale ont les effets les plus courants en droit musulman classique.

Chez les Ḥanafites, même le walī peut conclure un mariage au nom des impubères des deux sexes et, en ce qui a trait particulièrement à la fille, qu’elle soit vierge ou déflorée. Parvenus à la puberté, les garçons et les filles bénéficient d’un droit d’option (khiyār) s’ils ont été mariés par leur walī mudjbir, lequel peut, dans cette école, être choisi parmi un grand nombre d’agnats ; si c’est le père ou l’aïeul qui a exercé le droit de djabr, aucune rescision n’est en revanche possible. Une femme esclave mariée contre son gré par son maître peut aussi faire annuler son mariage s’il lui arrive d’être affranchie.

Chez les Shāfiʿites, le walī ne peut marier une fille vierge sans son consentement, au moins tacite ; seul le père ou le grand-père dispose en effet du droit de djabr, mais, dans cette école, c’est la notion de virginité qui entre en jeu, la défloration légale, accidentelle ou illégale entraînant pour l’intéressée la faculté de consentir à son mariage (ou remariage), même si elle est encore impubère.

Pour les Ḥanbalites, les conditions d’exercice du droit de djabr se rapprochent de celles des Mālikites, qui se montrent les plus rigoureux en combinant les notions d’impuberté et de virginité. En effet, le père a le droit de marier sa fille sans son consentement, non seulement si elle est frappée d’incapacité, comme dans les autres écoles, mais encore, avec certaines restrictions, tant qu’elle est vierge, qu’elle soit pubère (et même vieille fille) ou impubère ; il exerce également le droit de djabr sur l’impubère déflorée par suite d’un mariage légal et sur la pubère déflorée accidentellement ou illégalement. Il n’existe aucun droit d’option, mais le père a l’obligation de respecter le principe selon lequel les époux doivent être assortis [voir Kafāʾa]. Pour échapper au djabr paternel, la fille doit donc être pubère et déflorée légalement (thayyib) ou encore, si elle a conservé sa virginité après sa puberté, avoir été émancipée quant aux biens ou mariée depuis un an au moins et répudiée ou veuve sans que le mariage ait été consommé. Le walī autre que le père n’est jamais mudjbir, c’est-à-dire qu’il n’a le droit de marier une fille que lorsqu’elle est pubère, mais son consentement, tout au moins tacite, est alors exigé ; une fois devenue thayyib, elle doit donner un consentement explicite par l’intermédiaire de son walī.

Chez les Shīʿites imāmites, le droit de djabr appartient au père, et, sous certaines réserves, à l’aïeul. Il s’exerçait dans les premiers temps sur la fille vierge, quel que fût son âge, mais la doctrine a fini par admettre que la vierge pubère n’y est plus soumise.

Telle est la théorie. Dans la pratique, les gouvernements de la plupart des pays musulmans indépendants ou placés sous une tutelle étrangère ont depuis longtemps essayé de mettre un frein au droit de djabr en fixant l’âge du mariage à douze ans et plus pour les filles et en interdisant aux ḳaḍīs de conclure des unions trop précoces, mais il n’a pas toujours été possible d’exercer un contrôle très strict. Dans les États qui se sont dotés d’une législation moderne, ce droit a été totalement aboli ou restreint par l’obligation du consentement mutuel des époux, mente si l’intervention du walī est encore requise (…).

Source : Encyclopédie de l'Islam, 2e éd., 1981, p. 233, <www.google.fr/books>.

Conclusion

Les quatre grandes écoles juridiques sunnites, ainsi que les chiites duodécimains, autorisent donc le mariage précoce forcé et empêchent à l'enfant marié de divorcer avant qu'il devienne pubère pour le garçon, et avant qu'elle devienne pubère ou qu'elle ait subi un coït pour la fille (et dans quelques autres cas).

Avoir des relations sexuelles avec l'enfant contre son gré étant par ailleurs légal avant comme après qu'elle devienne pubère, le mari peut ainsi violer sa femme-enfant copieusement avant qu'elle obtienne le droit de rescinder le mariage. Il a aussi le temps de la conditionner à lui obéir. L'islam ouvre un boulevard aux pédomanes et aux manipulateurs qui souhaitent profiter d'un enfant, un être sans défense.

Glossaire

Jabr (جَبْر)
Signifie littéralement coercition.
Agnats
Les agnats de quelqu'un sont les mâles qui lui sont apparentés par des parents mâles.
Rescision
En droit français, ce terme désigne l'annulation judiciaire d'un acte, d'un contrat pour cause de lésion ou d'incapacité du signataire à la date de son engagement (source : dictionnaire-academie.fr).

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